Un kamikaze s’est fait exploser ce jeudi dans le centre de Kaboul tuant au moins dix personnes et en blessant plus de quarante autres. Plutôt dans la semaine, un véhicule-piégé avait coûté la vie à plus de seize personnes dans des installations utilisées par des organisations internationales. Ce regain d’attaques dans la capitale afghane intervient au moment où un accord-cadre semble se dessiner dans les négociations de paix entre les Talibans et les USA.
L’attaque de jeudi matin, revendiquée par les Talibans s’est produite dans le quartier de Shash Darak, située à proximité de la zone verte qui abrite le quartier-général des forces de l’OTAN et l’ambassade américaine. A un check-point fréquenté, le kamikaze a actionné sa charge explosive, soufflant les personnes aux alentours ainsi que de nombreux véhicules et magasins. On dénombre dix morts et plus de quarante blessés. Quelques heures plus tard, les Talibans ont mené une autre opération, dans la province voisine en ciblant cette fois une base militaire afghane, faisant quatre morts. Lundi, c’est un tracteur-piégé qui a explosé près du complexe de Green Village qui accueille de nombreuses ONG. Après l’explosion et une fusillade, on compte seize morts et plus de 120 blessés.
Si Kaboul est fréquemment la cible d’attaques terroristes, on dénombre ces dernières semaines un nombre croissant d’opérations de la part des Talibans dans la capitale et de part et d’autre du pays alors que ces derniers semblent se rapprocher d’un accord concernant le départ des forces étrangères à Doha avec les Américains. « La paix avec un groupe qui continue de tuer des innocents est sans aucun sens » a déclaré, le président afghan, Ashraf Ghani dans un communiqué jeudi.
Le 7 août, les Talibans avaient revendiqué l’attentat à la voiture-piégé qui a tué 14 personnes et blessé près de 150 autres dans l’ouest de la capitale, à dominante chiite à proximité d’un bâtiment de la police afghane. Au même moment, l’armée afghane luttait avec difficulté face aux Talibans dans la région du Panjshir, sous la menace des insurgés islamiques depuis plusieurs semaines. En fin de semaine dernière, les Talibans avaient lancé une vaste opération sur Kunduz, l’une des grandes villes du pays qui avait poussé l’armée afghane à une intense riposte terrestre avec appui aérien pour écarter la menace.
Ces opérations interviennent au moment où les Talibans et les Américains sont en phase de conclure un accord-cadre dans les négociations de paix qui se tiennent à Doha au Qatar. Lundi, au moment où les Talibans frappaient la capitale afghane, Zalmay Khalilzad, le négociateur en chef de la délégation américaine annonçait que les deux parties s’étaient entendus sur un accord-cadre qui prévoit le départ des troupes américaines de cinq bases dans les 135 jours suivants sa signature.
D’ici à ce qu’elle soit effective et approuvée par le président américain Donald Trump, Zalmay Khalilzad va rencontrer le gouvernement afghan et l’OTAN pour leur faire part des détails du dit-accord. Résignés après 18 ans de guerre en Afghanistan, les USA devraient, selon l’accord-cadre retirer quelques 5400 de ses soldats d’ici à début 2020. C’est un peu plus du tiers des 14000 soldats encore stationnés en Afghanistan.
Avec une stratégie mêlant négociations et opérations armées, les Talibans s’assurent une sortie des Américains hors d’Afghanistan tout en cherchant à augmenter leurs gains territoriaux à travers le pays et à harceler sans cesse un gouvernement afghan qu’ils ont maintenu hors des négociations de paix qu’ils poursuivent avec les USA.
Cette exclusion répond au manque de légitimité que les Talibans accordent au gouvernement d’Ashraf Ghani qu’ils considèrent comme des marionnettes des Américains. Les pourparlers de paix de Doha ne ramèneront donc pas la paix en Afghanistan et avec les troupes étrangères en moins dans le pays, les Talibans concentreront leurs efforts pour prendre Kaboul et rétablir leur régime tombé fin 2001. C’est ce qu’ils ne cessent de promouvoir, comme mi août dans leurs vidéos de propagande en appelant à frapper les forces afghanes comme celles de la coalition internationale.
Julien Lathus