Comment analyser les protestations anti-américaines en Inde ?

Alors que le monde musulman s’est enflammé depuis le 11 septembre en réaction au film produit aux USA par un mystérieux Copte américain, les démonstrations en Inde ont-t-elles une approche différente de celles du monde arabe ? C’est ce que pense une journaliste qui a décidé …

Alors que le monde musulman s’est enflammé depuis le 11 septembre en réaction au film produit aux USA par un mystérieux Copte américain, les démonstrations en Inde ont-t-elles une approche différente de celles du monde arabe ? C’est ce que pense une journaliste qui a décidé d’analyser le rôle des salafistes en Inde.

Manifestants devant le consulat américain à Kolkata le 27 septembre par DS, gettyimages

Manifestations et violences au Cachemire, tentative d’assaut sur le consulat américain de Chennai (Madras), drapeau américain et effigie d’Obama brûlés à Kolkata (Calcutta) ont rythmé la fin du mois de septembre en Inde. Mais qui sont derrière ces démonstrations ?

Face à ses évènements qui ont frappé la majorité des pays musulmans, l’occident semble avoir découvert les salafistes comme le prouve les nombreux reportages ayant pour titre « Qui sont les salafistes ? ». Accusés de soulever les foules, ces activistes prônant un retour à l’Islam des origines n’ont pourtant pas eu le même rôle dans les manifestations indiennes.

En Inde, une culture de la protestation et des salafistes non démonstratifs.

Krista Mahr, chef du bureau d’Aise du Sud pour le Time s’est focalisée sur la vision des salafistes indiens sur ces évènements  Mais dès le départ, elle souligne le caractère différent des manifestations en Inde par rapport au reste du monde. « Principalement en raison du fait que ces protestations n’ont pas attiré beaucoup d’attention dans le monde car en Inde, on lève son poing pour tout, pour protester contre le nucléaire ou contre la hausse du prix des oignons » explique-t-elle.

Manifestation à Bombay contre un projet de barrage en 2009 par international rivers, flickr

En effet, alors que le monde musulman se soulevait, l’Inde était déjà en proie avec 2 grands mouvements de contestation portant sur la hausse du prix de l’essence et sur l’autorisation gouvernementale à l’introduction des géants de la distribution Tesco et Walmart en Inde. Les protestations contre le film islamophobe se seraient donc fondues marginalement dans un climat déjà saturé de revendications.

Une autre différence majeure que l’Inde offre dans ces démonstrations réside en la nature même des manifestants. Alors que le monde s’inquiète de la prise des rues par les salafistes, ce schéma semble d’une autre nature en Inde. Selon une organisation salafiste indienne, il y aurait entre 20 à 30 millions de Musulmans indiens se revendiqueraient de cette branche. Mais alors qu’ils ont tenu le pavé dans le monde musulman en réaction contre le film, ils auraient joué un rôle mineur en Inde.

A New Delhi, la journaliste interroge un responsable d’une organisation salafiste qui explique pourquoi son mouvement est minoritaire dans ces protestations. « Lorsqu’un Coran est brûlé ou que ce genre de film est tourné, nous n’apprécions pas mais nous ne soutenons pas les actions des manifestants. Nous suivons à la lettre les enseignements du Prophète. Tout ce que ces manifestants font comme prendre les rues et détruire des choses, le Prophète ne nous les ont pas apprises » explique-t-il.

Le drapeau américain attaqué en Inde par kB

Il affirme que son groupe a été critiqué par les autres Musulmans pour ne pas avoir pris part aux manifestations. Pour un groupe salafiste important du Kerala, la démarche est la même. « Si nous sommes capable d’être de bons Musulmans, leur propagande ne nous atteindra pas » indique Hussain Madavoor, secrétaire général de ce groupe du sud de l’Inde.

Même au Cachemire, où les tensions éclatent souvent entre l’interprétation fondamentaliste des salafistes et les croyances des soufis, ce ne sont pas les salafistes qui ont appelé à manifester en premier mais bien les soufis en réaction au film. Les autres groupes ont alors suivi.

Krista Mahr s’interroge alors sur l’influence des salafistes en Inde bien qu’elle considère que ce pays, comme toute autre nation est vulnérable aux périls de l’extrémisme, surtout depuis une recrudescence des violences en tout genre. « Mais l’Inde est un pays vaste, à la fois sur le plan physique et sur le plan psychologique, et la diversité qui existe même au sein d’un minorité religieuse est telle que cela prévient le type d’événement que nous avons pu voir ailleurs » explique-t-elle.

« Nous ne sommes pas anti-américain mas il est douloureux pour nous de voir que le peuple américain s’amuse avec la figure du Prophète » affirme un leader salafiste du Cachemire en ajoutant que son organisation avait appelé à manifester mais qu’elle s’opposait aux slogans anti-américain et aux immolations de la bannière étoilée.

Sources :

DNA (Inde) en VO.

Reuters India (Inde) en VO.

Time (USA) en VO.

Julien Lathus

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