Cameron en Inde et les affres du passé colonial.

Lundi, le premier ministre britannique, David Cameron est arrivé en Inde pour une visite de 3 jours. Un objectif : dynamiser les échanges commerciaux entre les 2 pays aux liens historiques forts. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que le chef de l’exécutif britannique est arrivé …

Lundi, le premier ministre britannique, David Cameron est arrivé en Inde pour une visite de 3 jours. Un objectif : dynamiser les échanges commerciaux entre les 2 pays aux liens historiques forts. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que le chef de l’exécutif britannique est arrivé en Inde à Bombay, capitale commerciale et financière du pays. « J’ai amené avec moi la plus grande délégation d’industriels à avoir quitté les rives britanniques et je suis vraiment fier de les avoir amenés ici pour rencontrer les hommes d’affaires indiens et relier nos pays » lance-t-il d’emblée pour donner le ton à cette visite.

Entre visite commerciale et passé colonial, le temps pour un run de cricket.

Entre visite commerciale et passé colonial, le temps pour un run de cricket.

Ce que David Cameron attendait peut-être moins, c’est de voir resurgir les fantômes du passé colonial britannique. Ce mercredi, il achève sa visite dans l’ancien Empire des Indes par un déplacement inattendu au Punjab, à Amristar, sur les lieux d’un massacre perpétré par les troupes britanniques durant l’ère coloniale. Le 13 avril 1919, un officier britannique adepte de la loi martiale avait ordonné à 50 de ses soldats d’ouvrir le feu sur une foule de 10 000 Indiens désarmés et manifestants contre l’extension des lois de détention issues de la 1ère guerre mondiale. Une enquête britannique avait fait état de 379 morts et 1100 blessés mais les estimations indiennes indiquent que près de 1000 personnes étaient mortes en ce funeste jour.

Après avoir déposé une gerbe de fleurs sur le mémorial, David Cameron a laissé quelques mots sur le livre d’or du site. « Ce fut un événement profondément honteux de l’histoire britannique et un évènement qu’en son temps Winston Churchill a qualifié à raison de monstrueux. Nous ne devons jamais oublier ce qui s’est produit ici. Et en se souvenant, nous devons faire en sorte que le Royaume-Uni milite pour les droits à manifester pacifiquement dans le monde » peut-t-on lire après son passage. Un acte monstrueux certes, mais aucune excuse de la part du premier ministre. 

Des regrets mais aucune excuse officielle pour le massacre d'Amristar.

Des regrets mais aucune excuse officielle pour le massacre d’Amristar.

Peu avant son arrivé au Jallianwalla Bagh, le secrétaire du mémorial espérait voir David Cameron rendre hommage et présenter ses excuses aux morts. Il n’aura que la moitié de ces souhaits. Un peu plus tard, le premier ministre explique sa décision face à de telles attentes. « Je ne pense pas que ce soit la chose à faire que de remonter dans l’histoire et de chercher des choses pour lesquelles on peut s’excuser. La meilleure chose est de reconnaître ce qui s’est passé, de rappeler ce qui s’est produit et de faire preuve de respect pour ce qui s’est déroulé» indique-t-il.

Ce déplacement de M. Cameron, tenu secret jusqu’à mercredi matin, est considéré par certains de ses conseillers comme une entreprise à double tranchant, selon une source proche de la délégation qui l’accompagne. Certains s’inquiètent du risque d’exhumer les vieilles blessures au moment où M. Cameron insiste sur les perspectives d’avenir, notamment sur le plan commercial, entre l’Inde et l’ex puissance coloniale. Sa visite risque aussi de susciter des interrogations sur la difficulté des Britanniques à faire publiquement leur examen de conscience sur le passé colonial.

M. Cameron est le premier Premier ministre en exercice à visiter le site, selon des sources diplomatiques, mais pas la première personnalité britannique.En 1997, la reine avait également déposé une gerbe mais son mari, le prince Philippe, avait anéanti ses efforts en jugeant le bilan des victimes dressé par l’Inde « largement exagéré ».

Le Koh-i-Noor, monté au centre de la couronne britannique.

Le Koh-i-Noor, monté au centre de la couronne britannique.

Cette visite de David Cameron est également l’occasion pour faire resurgir le conflit qui oppose l’Inde et le Pakistan à la Grande-Bretagne au sujet du plus gros diamant de la planète : le Koh-i-Noor. Ce joyau de 105 carats était l’un des symboles de la dynastie de Moghols dont les empereurs eurent la possession de 1526 à 1739. Au gré des invasions et des remerciements, le joyau s’est baladé de la Perse à l’Afghanistan avant de tomber aux mains des Britanniques au Punjab en 1849. Offert à la reine Victoria en 1850 à l’occasion des 250 ans de la Compagnie Anglaise des Indes Orientales, le diamant fut monté sur la couronne d’Elisabeth en 1936.

Périodiquement, les gouvernements indiens et pakistanais revendiquent sa paternité et demandent à la Grande-Bretagne de leur restituer. Aujourd’hui, cette couronne est exposée au musée de la Tour de Londres. Au cours de sa visite, David Cameron indique que l’Angleterre ne prévoit pas de rendre le diamant. « Je ne crois pas du tout à son déplacement. Je ne pense pas que cela soit une chose importante » déclare-t-il à ce sujet.

Sources :

Global Post (USA) en VO.

Hindustan Times (Inde) en VO.

Time (USA) en VO.

Julien Lathus

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