Ce dimanche, le district de Ghotki dans le sud-est du Pakistan a été le théâtre d’émeutes contre la minorité hindoue, déclenchées par l’accusation de blasphème supposé de la part d’un principal d’école. Une foule incontrôlable a alors mis à sac l’école où exerce le principal ainsi que trois temples et plusieurs maisons et boutiques appartenant à la communauté hindoue. Les dommages se chiffreraient en millions de roupies pakistanaises.
Le principal de l’école a été appréhendé par la police qui le détient depuis qu’un étudiant de cette école aurait raconté à son père qu’il aurait tenu des propos controversés à l’égard du prophète de l’Islam. Jamil Ahmed, inspecteur de la police de Sukkur a indiqué sur Twitter que l’accusé était en sécurité dans les locaux de la police et qu’une action judiciaire allait être entreprise tout en indiquant que les responsables des violences seraient également justiciables et que certains d’entre eux avaient déjà été arrêtés.
Alleged accused in a sensitive case of Ghotki is now in the custody of Police. Situation in Ghotki is back to normal within 12 hours.
Fair investigation is being done after confirming facts & justice ensured. Cases against hooligans are being registered & miscreants being nabbed.— Addl IGP Dr Jamil Ahmed (@jahmed95) September 15, 2019
Le Pakistan est un des pays au monde où la loi contre le blasphème est l’une des plus sévères et la loi y prévoit la peine de mort dans ces affaires d’insulte à l’encontre du prophète Mohammad. En dépit des nombreuses affaires instruites ces dernières années, aucune exécution n’a toutefois été appliquée mais souvent au Pakistan, une foule en colère s’est substituée à la place de la justice et a lynché l’accusé en question.
Selon les groupes de défense des droits de l’homme, la loi anti-blasphème est souvent exploitée par les tenants d’une ligne religieuse dure mais également par des Pakistanais ordinaires cherchant à régler une querelle. Ce lundi matin, l’organisme indépendant Human Rights Commission of Pakistan a dénoncé ces violences et a enjoint les autorités à prendre les dispositions nécessaires pour éviter ce type d’émeute et à protéger le principal incriminé. « La vidéo qui circule de cet évenement est effrayante : la vindicte populaire contre une personne issue d’une minorité religieuse est barbare, inacceptable » peut-on lire sur le compte Twitter de l’organisation.
#Ghotki The authorities must take prompt action to quell the violence and ensure the safety of the school principal being targeted. The video circulated earlier is chilling: mob violence against a member of a religious minority is barbaric, unacceptable. https://t.co/0OrxUsO2fV
— Human Rights Commission of Pakistan (@HRCP87) September 15, 2019
Au Pakistan, la minorité hindoue représente 1,6 % des 208 millions du pays où l’Islam sunnite est majoritaire. En 2010, la chrétienne Asia Bibi est devenue le symbole des lois anti-blasphème au Pakistan quand cette dernière a été condamnée à mort en vertu de l’article 295-C de la constitution pakistanaise. Après avoir passée des années dans le couloir de la mort d’une prison pakistanaise, Asia Bibi a finalement été acquittée le 31 octobre dernier par la Cour Suprême du pays. Son cas a mobilisé les milieux de défense des droits de l’homme internationaux mais également pakistanais durant tout son épisode judiciaire.
Julien Lathus