« La route vers la paix progresse bien en raison de l’interaction croissante entre nos deux gouvernements » a annoncé le ministre pakistanais de l’intérieur Rehman Malik au cours de son entretien avec son homologue indien, Sushilkumar Shinde. A New Delhi, l’Inde et le Pakistan ont déclaré ce vendredi qu’un accord sur le nouveau régime des visas devrait faciliter le franchissement de leur frontière. Cet accord symbolise surtout l’épuisement de leurs liens faits d’hostilité.
Ce nouveau système d’obtention de visas va permettre aux membres des familles divisées, aux businessmen, aux touristes et aux pèlerins de pouvoir accéder plus rapidement au précieux sésame. Auparavant, il fallait des mois pour obtenir un visa indien ou pakistanais. Cet accord doit entrer en vigueur en deux temps, le 15 janvier 2013 et le 15 mars suivant. Les personnes âgées de plus de 65 ans pourront obtenir un visa à la frontière et les autres pourront avoir un visa dans les 45 jours.
Néanmoins, si nous pouvons nous réjouir de cet accord, il faut garder à l’esprit que ces améliorations relationnelles entre les deux pays suivent un processus lent. Pour preuve, le simple fait que le ministre Rehman Malik est arrivé en retard à New Delhi ce vendredi. Quatre heures de retard en raison de problèmes sécuritaires invoqués par l’Inde face à l’avion militaire utilisé par le ministre pakistanais pour se rendre à ce rendez-vous crucial.
C’est un fait mineur au premier abord mais tellement révélateur de la complexité du processus de normalisation des liens entre les deux pays. « Le pilote attendait des autorisations. Il a été retardé. Cela dépasse mes compétences » explique le ministre pakistanais en cherchant à minimiser le fait. Les autorités indiennes n’ont pas commenté ce retard procédurier face à l’atterrissage d’un avion militaire pakistanais sur son sol.
Nous observons bien une volonté des deux pays à chercher une résolution de conflit mais l’Inde et le Pakistan restent enfermés dans cette chape de plomb façonnée par des décennies de méfiance et de coups de feu. Ce retard symbolise ce manque de confiance qui bride les deux pays dans leur route vers la paix. Sans cette confiance, la normalisation de leurs relations risque de prendre beaucoup de temps et l’Inde comme le Pakistan n’avanceront l’un vers l’autre qu’à petits pas.
Ne pas vouloir brusquer la diplomatie entre les deux pays peut apparaitre comme un atout dans la consolidation des acquis pacifiques mais elle peut se révéler comme un piège dans le sens où durant tout ce temps de maturation diplomatique, les extrémistes de tous bords peuvent saper ce processus et influencer des élections tout en portant au pouvoir des acteurs politiques qui n’auront peut-être pas la même volonté de paix entre les deux pays.
En 2013, l’Inde et le Pakistan connaitront des élections qui peuvent renverser la dynamique puisque dans les deux pays des courants conservateurs nationalistes prennent de plus en plus d’importance. Quelle sera alors la dynamique de la paix dans ce nouveau contexte ? Comment l’établissement de mesures de confiance pourra alors bâtir de nouveaux ponts entre les deux pays quand chaque gouvernement se caractérisera par son discours nationaliste ? Voilà les questions à se poser pour réévaluer l’urgence de certains dossiers qui pèsent lourds dans la balance relationnelle entre l’Inde et le Pakistan, au premier rang desquels le Cachemire peut symboliser la clé de la résolution de ce conflit pluridécennal.
Source :
USA Today (USA) en VO.
Julien Lathus.