La bonne volonté et la présence de la ministre pakistanaise des affaires étrangères à Genève pour la présentation du rapport sur les droits de l’homme au Pakistan n’auront pas suffi à convaincre le Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU.
« Le Pakistan, pris à la gorge par le militantisme islamique, la violence sectaire et les fréquentes catastrophes naturelles voit sa population sombrer dans la pauvreté » annonçait l’ONU mardi dernier.
La ministre Hina Rabbani Khar qui menait la délégation pakistanaise a déclaré que son gouvernement est engagé dans l’amélioration de la condition des droits de l’homme au Pakistan.
« Le Pakistan est un état démocratique, pluraliste et progressiste engagé à fonder une société juste, basé sur l’égalité, le respect de la diversité et la justice… Aujourd’hui, le Pakistan est une démocratie qui fonctionne avec un parlement élu et souverain, avec une justice indépendante, des médias libres et une société civile vibrante et robuste » a déclaré Hina Rabbani Khar.
Pourtant, les pays occidentaux n’ont pas été convaincus. Parmi eux, même la Biélorussie, connue pour ses traditionnelles positions anti-occidentales, n’a pas trouvé le rapport suffisant. Tous soulignent les manquements du pays pour lutter contre les persécutions envers les minorités religieuses, les exactions contre certains dissidents ou le peu d’action pour enrayer le trafic humain.
Si Hina Rabbani Khar s’est rendue à Genève, ce n’est pas simplement pour présenter ce rapport. La ministre cherche également à défendre la candidature de son pays pour l’élection des membres du Conseil des Droits de l’Homme qui doit se tenir le 12 novembre. Autant dire que plusieurs pays ont indiqué que le Pakistan n’était pas un candidat adéquat pour cette organisation.
« Nous avons de sérieuses inquiétudes concernant la situation des droits de l’homme au Pakistan » a déclaré l’ambassadrice américaine, Eileen Donahoe en sous-entendant la manière dont l’armée pakistanaise agit dans la province rebelle du Baloutchistan. La diplomate américaine évoque des cas de tortures, d’assassinats extra-judiciaires et de lois utilisées pour justifier la discrimination religieuses.
Sur ce dernier point, elle fait également référence à la loi sur le blasphème qui frappe souvent de manière obscure les minorités chrétiennes et hindoues. Le rapport soutenu par la ministre Hina Rabbani Khar indique que 240 Musulmans et 9 non-Musulmans ont été inculpés sous la loi du blasphème entre 2007 et 2010.
Parallèlement au rapport, Hina Rabbani Khar met en lumière le fait que la législation de son pays agissait pour enrayer la violence et le harcèlement contre les femmes. Elle y mentionne Malala Yousafzai, la jeune Pakistanaise de 14 ans, attaquée par des Talibans pour avoir revendiquée le droit à l’éducation des femmes.
Hina Rabbani Khar s’est aussi exprimée sur l’augmentation du terrorisme et de l’extrémisme au Pakistan, « un défi majeur pour notre sécurité nationale » qu’elle relie au moment où la CIA finançait le jihad contre l’Union Soviétique. « Les extrémistes prennent pour cible les hôpitaux, les écoles, les sanctuaires religieux, les mosquées. Cela a créé un environnement d’intimidation envers les responsables de l’application de la loi, envers les juges ou envers les médias et les activistes de la société civile » explique-t-elle.
La ministre a profité de l’occasion pour réitérer l’opposition du Pakistan aux attaques de drones américains dans les zones tribales en invoquant la violation de souveraineté nationale.
Face au rapport pakistanais et au discours de la ministre, le Conseil des Droits de l’Homme a également souligné plusieurs manquements. En effet, rien n’a été mentionné sur le cas des personnes disparues, ni sur la condition de la communauté chiite.
Le conseil a aussi mentionné que rien n’avait été fait sur le travail forcé et a constaté que les châtiments corporels sur les enfants étaient toujours légaux au Pakistan. Les pays européens y voient de graves atteintes aux droits de l’homme.
Sarfaraz Cheema, manager régional de la Société de Protection des Droits des Enfants (SPARC) indique que la plupart des pays ont donné les mêmes recommandations au Pakistan qu’ils avaient donné en 2008 au cours du dernier rapport sur la situation des droits de l’homme dans ce pays.
Sources :
Dawn (Pakistan) en VO.
The Express Tribune – International Herald Tribune (Pakistan) en VO.
Reuters (Royaume-Uni) en VO.
Julien Lathus