Le président pakistanais Asif Ali Zardari a annoncé mercredi la tenue d’élections législatives pour le 11 mai prochain. Depuis son indépendance en 1947, c’est la première fois qu’un gouvernement civil élu termine son mandat et prépare la transition démocratique par le biais d’élections. Entre rivalités politiques, enjeux internes ou extérieurs et la transition démocratique, le cœur du pays bat au rythme de ce rendez-vous avec l’histoire.
L’annonce de la date de ce scrutin-clé pour la consolidation de la démocratie au Pakistan était attendue depuis la fin du mandat de 5 ans du Parti du Peuple Pakistanais samedi dernier. « Le président a reçu une note de la part du gouvernement lui demandant d’annoncer une date adéquate pour la tenue des élections. Il annonce aujourd’hui que les élections générales de l’Assemblée Nationale se tiendront le 11 mai 2013 » déclare un porte-parole de la présidence. Il reste maintenant à la Commission Électorale du Pakistan (organe indépendant chargé du processus électoral) d’établir le calendrier de ses élections. Elle devrait se prononcer ce samedi sur leur organisation tout en traitant les dépôts de candidature dont la clôture est prévue le 30 mars.
Les autorités pakistanaises doivent également annoncer dans les prochains jours la composition du gouvernement intérimaire chargé de gérer les affaires courantes du pays jusqu’à la prestation de serment du nouveau gouvernement qui sera issu des urnes. Jusqu’à ce jour, aucun consensus sur les 4 personnes proposées pour le poste alors que cette nomination devait intervenir aujourd’hui. Il est donc plus que probable que cet échec va conduire à la seconde option qui consiste en la nomination d’une personne pour ce poste par la Commission Électorale. Le gouvernement intérimaire sera alors en charge de surveiller les élections.
Les deux grands partis traditionnels, le Parti du peuple pakistanais (PPP) du président Zardari et la Ligue musulmane du Pakistan (PML-N) de Nawaz Sharif, ont chacun besoin de l’appui de tiers partis pour espérer former le gouvernement, selon de nombreux analystes et des sondages locaux. En position d’outsider apparaît le célèbre Imran Khan, ancien capitaine de l’équipe nationale de cricket qui joue sur la vague du populisme en dénonçant les attaques de drones américains sur le territoire pakistanais. Son parti, Mouvement du Pakistan pour la Justice (PTI) est devenu rapidement l’une des forces principales du pays en se plaçant au centre de l’échiquier politique pakistanais tout en lorgnant sur le nationalisme. Il cherche à se positionner comme une alternative crédible au PPP et au PML-N.
L’ancien président Pervez Musharraf, au pouvoir entre 1999 et 2008, aujourd’hui en exil à Dubaï, a quant à lui annoncé son retour dimanche prochain au Pakistan, afin de participer à ce scrutin historique. M. Musharraf risque toutefois d’être arrêté à son retour, car il fait l’objet de mandats d’arrêt concernant notamment les meurtres de l’ancienne Première ministre Benazir Bhutto et d’Akbar Bugti, un chef de la rébellion dans la province du Baloutchistan.
Le Pakistan, qui se trouve sur la ligne de front de la guerre contre le terrorisme, est miné depuis des années par une vague d’attentats islamistes, ethniques, religieux et même politiques qui pourrait compliquer la tenue de ces élections, notamment dans certains quartiers de la métropole économique Karachi (sud), les provinces du Baloutchistan (sud-ouest), du Khyber Pakhtunkhwa (nord-ouest) et les zones tribales frontalières de l’Afghanistan, où des drones américains attaquent régulièrement des groupes armés islamistes. Le scrutin devrait être suivi de près par les Etats-Unis, premier bailleur de fonds du Pakistan, souvent accusé de soutenir les talibans afghans et dont le soutien est capital pour stabiliser l’Afghanistan après le retrait des forces de l’Otan à la fin 2014.
Un collège électoral formé des membres du parlement national et des assemblées provinciales devra par la suite élire le nouveau président de ce pays musulman de 180 millions d’habitants.
Julien Lathus