Les ministres des affaires étrangères de l’Inde et du Pakistan se retrouveront à Islamabad en juillet pour évoquer la question du Cachemire. L’information a été révélée ce jeudi par Moazam Ali Khan, porte-parole de la ministre pakistanaise, Hina Rabbani Khar.
« Nous n’avons pas de date précise pour le moment » a-t-il déclaré devant des journalistes. Des sources affirment néanmoins que la rencontre de Khar avec son homologue indien, S.M. Krishna devrait avoir lieu dans la troisième semaine de juillet.
Depuis avril 2011, des officiels indiens et pakistanais ont entamé une série de rencontres sur des questions comme le glacier du Siachen, l’estuaire de Sir Creek, le commerce, le contre-terrorisme et le Cachemire, sujet d’un long désaccord.
Lors de leur dernière entrevue à New Delhi en 2011, les deux ministres des affaires étrangères avaient annoncé une série de mesures de confiance (CBM) sur le Cachemire. Dans leurs pourparlers à venir, Khar et Krishna devraient faire le point sur les avancées de tous les dossiers mais aucune révolution majeure n’est attendue sur la question du Cachemire.
Alors que les officiels pakistanais insistent sur le fait qu’un dialogue constructif ne doit pas être pris en otage par le moindre incident qui pourrait survenir, l’Inde établit un parallèle entre des progrès sur le Cachemire avec une implication d’Islamabad à agir contre les suspects des attentats de Bombay de novembre 2008. L’Inde déclare qu’une avancée sur ce dossier serait une aubaine pour le processus de normalisation de ses relations avec le Pakistan.
L’annonce de cette rencontre intervient au lendemain de la violation du cessez-le-feu par des soldats pakistanais le long de la frontière du Cachemire au cours de laquelle un soldat indien a trouvé la mort. Mercredi, les forces pakistanaises ont ouvert le feu à l’arme automatique et à l’obus au sud-ouest de la capitale du Cachemire indien, Srinagar. Les militaires indiens ont ripostés.
Le Pakistan ne s’est pas exprimé sur ce sujet. R.K. Palta, porte-parole de l’armée indienne déclare que l’Inde a contacté le Pakistan pour désamorcer la situation. « Pourtant, les troupes pakistanaises ont poursuivit leurs tirs sur les postes indiens » affirme-t-il et ajoutant que la situation restait tendue.
Point de vue des Cachemiris sur la question.
Si le Cachemire reste un contentieux majeur entre l’Inde et le Pakistan, une partie de la population cachemirie se sent prise en otage par cette situation. Dimanche 10 juin, des centaines de Cachemiris se sont regroupés le long de la rivière Neelum qui sépare les deux pays. Dans une forte démonstration émotionnelle, ils ont demandé aux deux pays de retirer leurs troupes du Cachemire
Du côté pakistanais de la rivière, des familles pleuraient la séparation de leurs membres, habitant du côté indien, en utilisant des haut-parleurs pour leur parler. Cette réunion, à l’instigation des nationalistes cachemiris est un véritable événement. D’ordinaire, les autorités n’autorisent pas de tels rassemblements.
Pour Ashraf Jan, dont la mère et le père sont en Inde, c’est en trop. Elle est retenue par ses proches afin de ne pas sauter dans la tumultueuse rivière pour rejoindre sa famille. « Laissez-moi y aller. Je veux juste revoir mes parents et après si je meurs, je serai en paix » déclare-t-elle, submergée par l’émotion.
L’armée comme la police indienne n’autorise pas les Cachemiris a se rendre à proximité de la rivière. Ils peuvent néanmoins traverser la frontière par un bus spécial inauguré en 2005 mais les formalités sont si longues et dures à obtenir que peu y accèdent.
Pour Arif Shahid, président de l’organisation pro-indépendantiste, Jammu Kashmir National Liberation Conference, l’Inde et le Pakistan devraient agir autrement. « Les deux pays gaspillent tant d’argent pour leurs armées alors que des millions de personnes n’ont nulle part où dormir ni un repas chaque soir. Ils devraient retirer leurs troupes du Cachemire et nous libérer. Ils seront ainsi en mesure de travailler pour le bien-être de leurs citoyens » déclare-t-il.
En commentant l’échec des pourparlers sur le glacier du Siachen (voir article The Indian Papers du 12 juin 2012), Syed Ali Shah Geelani, président de l’alliance politique Hurriyat Conference pour l’auto-détermination déclare que « la vraie raison de la dispute et de la méfiance entre les deux pays est le problème du Cachemire ».
« Aucune avancée ne peut se faire sur quelque sujet que ce soit entre l’Inde et la Pakistan tant qu’une résolution sur le Cachemire ne sera pas prise en accord avec les aspirations du peuple » affirme-t-il dans un communiqué de presse, en ajoutant que tous les dossiers, même celui de l’estuaire de Sir Creek (voir article The Indian Papers du 3 mai 2012) est directement lié à celui du Cachemire.
Il reprend en disant que ce problème vieux de 65 ans a causé 3 guerres et de nombreux conflits de moindre importance, impliquant la vie et l’honneur des peuples des deux pays. « Les habitants du Jammu et Cachemire ont lutté pour leur droit à l’auto-détermination depuis 1947 et ils ont tant souffert durant toute cette période » déclare-t-il.
Pour lui, la paix et la stabilité continueront d’être effacées du sous-continent tant que le cas du Cachemire n’aura pas été résolu au regard des souhaits et des aspirations des Cachemiris.
Après la première guerre indo-pakistanaise de 1947, les Nations-Unies avaient adopté la résolution 47 du 13 aout 1948 qui prévoyait d’aider l’Inde et le Pakistan à restaurer la paix dans la région et de préparer un référendum pour décider du destin du Cachemire. Cette initiative tendant vers l’auto-détermination du Cachemire n’a jamais été suivie.
Sources :
FirstPost (Inde) en VO.
South Asian News Agency (Inde) en VO.
The Express Tribune – International Herald Tribune (Pakistan) en VO et ici.
Julien Lathus