Le secteur du tourisme indien paie les pots cassés de la mauvaise publicité engendrée par les affaires de viols qui secouent l’Inde depuis la fin de l’année 2012. Pour le premier trimestre, le nombre de touristes étrangers a enregistré une chute de 25%. Selon l’enquête menée par la Chambre de Commerce et de l’Industrie d’Inde (Assocham), ce résultat est directement lié aux peurs face aux risques d’agressions sexuelles.
Depuis le viol collectif sur une étudiante de Delhi en décembre dernier, l’Inde souffre de la médiatisation sur la condition de ses femmes. L’impact à l’international s’est amplifié avec le viol collectif d’une touriste suisse dans le centre du pays et la fuite par la fenêtre de sa chambre d’hôtel d’une Britannique, cherchant à éviter une agression à Agra. Toute une série d’événements qui ont marqué l’opinion publique et engendré des interrogation sur la sûreté du pays pour les femmes, indiennes comme étrangères. Le rapport indique que le nombre de femmes touristes est en chute de 35% par rapport à l’année dernière pour le 1er trimestre.
Les résultats de ce rapport, basé sur une enquête auprès de 1200 tours-opérateurs contredisent les affirmations gouvernementales sur la bonne santé du tourisme en Inde. Pour janvier et février, les chiffres du ministère du tourisme indiquent une hausse en nombre et en revenus en comparaison des 2 premiers mois de 2012. Un mois après le viol de Delhi, le secrétaire au tourisme, Pervez Dewan indiquait : « Pour le moment, il n’y a pas eu d’impact négatif sur le secteur touristique ».
Pourtant, depuis cette tragédie, au moins 6 femmes étrangères se sont plaintes aux services de police pour des attaques ou des traumatismes engendrés par des hommes, principalement dans des destinations touristiques. En réponse, plusieurs pays ont émis des recommandations à l’intention des voyageuses. « Alors que le nombre d’agressions sexuelles est en constante augmentation en Inde, selon les statistiques de la police, plusieurs faits récents ont mis en évidence que les femmes étrangères ou expatriées pouvaient également être victimes de ce type d’agissements. La plus grande prudence est donc recommandée » lit-t-on sur le site de Conseils aux voyageurs du ministère français des affaires étrangères.
« Les incidents de Delhi ne m’ont pas fait changer mes plans, mais il y a un sentiment renforcé de précaution » déclare Claire Skinner, une Britannique de 39 ans qui voyage seule dans le pays. Néanmoins, depuis ce café populaire de Connaught Place à Delhi, elle a décidé de s’en tenir aux destinations touristiques et de se déplacer qu’en avion. « Je ne prendrai pas les trains » ajoute-t-elle.
De son côté, Gour Kanjilal, directeur exécutif de l’Association Indienne des Tours Opérateurs pointe du doigt la mauvaise publicité faite à l’Inde. « Notre industrie est la première victime lorsque des crimes commis envers des étrangers sont commis, mais souvent, ils ne reflètent pas la vérité. Les touristes doivent être responsables. Ils devraient suivre quelques règles « à faire, à ne pas faire » » explique-t-il.
La police de Delhi a publié des chiffres effrayants. Depuis le 1er janvier, les abus sexuels sont en hausse de 590% et les cas de viols de 147% par rapport à la même période pour 2012. Le secrétaire-général d’Assocham, DS Rawat, indique qu’alors que le gouvernement cherche à engranger les dollars du tourisme pour réduire les déficits de la monnaie locale, la situation sécuritaire pousse les touristes à éviter l’Inde au profit d’autres destinations asiatiques comme la Malaisie, l’Indonésie et le Vietnam.
En 2012, plus de 6 millions de touristes ont permis à l’Inde de gagner près de 12 milliards d’€. D’ici à 2016, le pays cherche à accroître la fréquentation touristique de 12% pour doubler les revenus engendrés par ce secteur, l’un des plus importants de l’économie indienne.
Julien Lathus