Les autorités de l’état indien du Bihar ont imposé de nouvelles restrictions sur la vente de sirops contre la toux après la publication de nombreux rapports montrant leur détournement récréatif de plus en plus fréquent. Dorénavant, les pharmaciens n’auront plus le droit de posséder plus de 1000 bouteilles de Phensedyl en stock et une campagne d’information sur les risques de ce sirop sera lancée dans les écoles. Plus de 10 millions de bouteilles de Phensedyl ont été achetées en 2011-2012 dans l’état du Bihar, le plus pauvre de l’Inde. En vente-libre, il est souvent acheté par les toxicomanes qui s’en servent pour planer, indiquent les services de police.
Le Bihar est également une plaque tournante de ce sirop qui passe en contrebande au Népal, au Pakistan et au Bangladesh où il est interdit. D’un coût d’environ 1€ la bouteille au Bihar, il peut se revendre 4 fois plus au-delà des frontières.
Les inspecteurs anti-narcotiques ont demandé aux pharmaciens de conserver les traces des acheteurs, mais on ne sait pas comment cela peut être mis en œuvre dans des officines très fréquentées. « L’usage endémique du Phensedyl par les jeunes commence à apparaître comme une sérieuse menace et nous allons lancer très rapidement une campagne de sensibilisation dans les écoles de l’état » déclare le contrôleur des drogues du Bihar, Hemant Kumar Sinha.
Les médecins indiquent que les sirops contre la toux contenant de la codéine (issue des opiacés) peuvent amener à un état de somnolence et d’intoxication en cas de dépassement des doses prescrites. « Ceux qui en prennent depuis longtemps peuvent devenir complètement accrocs. Cela peut parfois leur être fatal » souligne le docteur Atul Verma.
Sanjay Kumar, un ancien dépendant déclare avoir cessé après qu’un de ses amis a trouvé la mort après une overdose de Phensedyl. « Nous consommions 6 à 7 bouteilles chaque jour. Je l’ai fais pendant 7 ans. Le produit est si facile d’accès car vendu sans ordonnance dans toutes les pharmacies. Le produit est très abordable et permet une bonne défonce » se souvient-t-il.
Selon un revendeur de la capitale du Bihar, Patna, se sont surtout les jeunes étudiants qui sont les principaux consommateurs de ces sirops. Ce phénomène ne s’arrête pas à l’Inde et entraîne parfois de graves dangers sanitaires. L’année dernière, 16 personnes sont mortes intoxiquées à Lahore, au Pakistan, après avoir consommé des bouteilles de ce sirop, contenant du poison. Au Bangladesh, il ne se passe pas une semaine sans que les autorités ne fassent état des saisies de ce sirop. La porosité de la frontière entre l’Inde et le Bangladesh laisse imaginer combien de ces bouteilles atteignent le marché noir bangladais.
Julien Lathus