Le grand rassemblement populaire a pris fin. Le leader religieux des protestations anti-corruption, Tahirul Qadri et le gouvernement ont trouvé un accord sur 4 revendications du mouvement. Durant 4 jours, des dizaines de milliers de Pakistanais manifestaient en face du Parlement à Islamabad. Contre la corruption, ils demandaient également la démission du gouvernement et du président Asif Ali Zardari alors que la Cour Suprême avait ordonné l’arrestation du premier ministre, Raja Pervez Ashraf, soupçonné dans une affaire de rétrocommissions.
Tahirul Qadri est parvenu à faire signer la Déclaration de la Longue Marche d’Islamabad après des heures de négociations avec une délégation gouvernementale. L’accord, ratifié par le premier ministre a engendré une explosion de joie parmi les manifestants qui ont célébré la nouvelle dans la clameur et l’euphorie. « Je vous félicite » leur lance Qadri et annonçant la fin du mouvement de protestation. « Allah nous a offert la victoire. Aujourd’hui est un jour de victoire pour le peuple pakistanais. Maintenant, vous devriez rentrer chez vous aussi pacifiquement que vous êtes venus » déclare-t-il face à ses supporters qui ont passé 4 jours dans le froid et sous la pluie.
Selon l’accord, il est prévu que « l’Assemblée Nationale devra être dissoute à n’importe quel moment avant le 16 mars et que des élections devront être organisées dans les 90 jours ». Le gouvernement pakistanais, dirigé par le Parti du Peuple Pakistanais (PPP) terminera son mandat de 5 ans le 16 mars et selon la Constitution, des élections seront tenues dans les 60 jours. Sur ce point, peu d’innovations au demeurant puisque ces échéances étaient prévues par le calendrier électoral.
Ce que l’accord prévoit d’important, est la constitution d’une commission électorale qui aura 1 mois pour s’assurer de l’éligibilité des candidats en vue des élections législatives et la nomination de 2 personnes du parti Pakistan Awami Tehreek, « honnêtes et impartiales » pour assurer le rôle de tuteur du Premier Ministre.
Après des heures de négociations jeudi, Qadri et le gouvernement sont donc parvenus à cet accord qui permet à chaque partie de sauver la face sans que le gouvernement n’ait à faire d’importantes concessions. Qadri, chef de l’organisation musulmane modérée Minhaj ul-Quran et chef du parti Pakistan Awami Tehreek était rentré début janvier de son exil volontaire au Canada, et avait aussitôt regroupé ses supporteurs pour dénoncer la « corruption » du gouvernement et exiger des réformes à l’approche d’élections prévues au printemps.
Au final, ces 4 jours auront poursuivi de montrer les faiblesses de l’état pakistanais en proie à ses démons comme la corruption et les failles étatiques. Le processus démocratique reste néanmoins sur les rails après les craintes de manipulation et de coup d’état. Le pouvoir pakistanais doit aussi réaliser que ses erreurs peuvent monter une foule revendiquant ses droits, si besoin par des méthodes révolutionnaires. Malgré le peu de contraintes que le pouvoir pakistanais ait à endurer de ce mouvement, la leçon est à retenir pour le futur et les politiques pakistanais devront s’en souvenir pour faire avancer le processus démocratique et d’idée d’un état aussi fort que propre. Si la révolution n’est pas arrivée, elle a fait des émules. « Nous allons rentrer à la maison et apprendre aux autres comment combattre pour nos droits de manière pacifique » s’enthousiaste un participant du sit-in.
Pour le gouvernement de la présidence d’Asif Ali Zardari, la fin de mandat ne sera pourtant pas de tout repos car le feu gronde encore dans le pays comme à Karachi, au Baloutchistan, au sein de la minorité chiite ou encore avec l’Inde sur le dossier de la reprise de dialogue après les accrochages au Cachemire.
Sources :
Dawn (Pakistan) en VO.
The Express Tribune –International Herald Tribune (Pakistan) en VO.
Julien Lathus