Visite du premier ministre pakistanais à Washington

Samedi 19 octobre, Nawaz Sharif s’est envolé pour Washington pour mener des pourparlers sur la paix en Afghanistan, mais également pour évoquer les tirs de drones américains au Pakistan et pour tenter de faire repartir la coopération économique entre ces deux pays aux relations torturées …

Samedi 19 octobre, Nawaz Sharif s’est envolé pour Washington pour mener des pourparlers sur la paix en Afghanistan, mais également pour évoquer les tirs de drones américains au Pakistan et pour tenter de faire repartir la coopération économique entre ces deux pays aux relations torturées malgré leurs statuts d’alliés dans la « guerre contre le terrorisme ». La question du Cachemire s’est aussi invitée dans les souvenirs du chef d’état pakistanais.

Vainqueur des élections de mai, Nawaz Sharif y a rencontré Barack Obama ainsi que le secrétaire d’état, John Kerry. Ce déplacement est la première visite officielle d’un premier ministre pakistanais à Washington depuis l’arrivé de Barack Obama à la Maison Blanche en 2009. Depuis son retour à la tête du Pakistan, Nawaz Sharif a multiplié les signes de détente avec les USA, au moment où les deux pays veulent s’assurer de la stabilité de l’Afghanistan après le retrait des forces de l’OTAN l’année prochaine.

Une rencontre dans le Bureau Oval de la Maison Blanche.

Mercredi, le président Obama a reçu pour un entretien de 2 heures le chef d’état pakistanais. Au programme : le futur de l’Afghanistan, les tirs de drones américains et la sécurité de l’arsenal nucléaire pakistanais. Des questions de stabilisation économique et de sécurité intérieure ont également été abordées.

Nawaz Sharif et Barack Obama dans le Bureau Oval de la Maison Blanche.

Nawaz Sharif et Barack Obama dans le Bureau Oval de la Maison Blanche.

Si le gouvernement pakistanais actuel est un peu moins pro-américain que le précédent, le Pakistan a un réel besoin de l’aide américaine pour renforcer son économie et palier à ses manques structurels, au premier rang desquels son secteur énergétique. Le Pakistan est également inquiet face au retrait des troupes américaines d’Afghanistan qui pourrait déstabiliser le pays, envoyer des vagues de réfugiés et voir une influence croissante de l’Inde en Afghanistan.

Nawaz Sharif a souligné « la nécessité de la fin des frappes de drones sur son territoire ». Si ces derniers sont depuis quelques mois en forte baisse, les officiels américains ne semblent pas vouloir les arrêter. Ce programme controversé est pour les USA un élément important de sa guerre contre le terrorisme, et il est source de frictions entre les 2 pays. Si Obama n’a pas répondu de manière directe à cette demande, il a reconnu que des efforts pour resserrer leurs liens étaient un « défi ». « Nous pensons qu’un Pakistan sécurisé, en paix et prospère n’est pas seulement bon que pour le Pakistan, mais également pour la région et pour le monde » répond Barack Obama.

Si Islamabad qualifie ces tirs d’atteinte à sa souveraineté, il lui a souvent été reproché de les soutenir officieusement. Récemment, le gouvernement de Nawaz Sharif a proposé aux Talibans pakistanais d’amorcer des pourparlers de paix alors que les attentats se multiplient depuis 6 ans au Pakistan. En réponse, les insurgés ont posé une série de conditions avant de venir s’asseoir à la table des négociations. Parmi elles, la fin des tirs de drones contre leurs repaires. « Les USA vont refuser de mettre un terme à ces attaques en invoquant le fait que le Pakistan doit améliorer son contrôle sur les zones tribales, ce qu’il n’est pas capable d’assurer pour le moment » explique l’analyste pakistanais Hasan Askari.

USA + Inde + Pakistan = résolution sur le Cachemire ?

Au cours de cette rencontre, Nawaz Sharif a évoqué son engagement pour renforcer ses liens avec l’Inde. « J’ai témoigné au président Obama de mon engagement sincère à construire une relation cordiale et coopérative avec l’Inde et que nos efforts se dirigeaient vers la résolution pacifique de tous nos différents, en incluant la question du Cachemire » rapporte le premier ministre pakistanais.

«Si que l’Inde ne souhaite pas qu’un troisième partie entre en jeu sur les négociations sur le Cachemire, les puissances mondiales devraient s’engager sur cette question » explique-t-il devant des journalistes. En escale à Londres et en route vers les USA, Nawaz Sharif s’est laissé aller à quelques souvenirs remontant à sa visite américaine de 1999. Déjà premier ministre du Pakistan, son homologue était Bill Clinton. Déjà, le Cachemire occupait l’espace et pour Nawaz Sharif, l’implication des USA sur cette question permettrait sa résolution. « Je lui avait dis que si il passait à peine 10 % du temps qu’il passait à l’époque sur le Proche-Orient, alors la question du Cachemire aurait pu être résolue » se rappelle-t-il en ajoutant que Clinton lui avait promis son soutien.

Nawaz Sharif tient à faire prendre conscience que l’Inde et le Pakistan sont engagés depuis plus de 60 ans dans une véritable course à l’armement. « La situation est devenue dangereuse. L’Inde a la bombe atomique et nous aussi. L’Inde développe des missiles, nous aussi. Il devrait y avoir une limite à cela. Nous devrions tous y penser » souligne-t-il.

La réponse indienne n’a pas tardé. Salman Khurshid, ministre des affaires étrangères a rejeté les propositions pakistanaises. « Il n’y a aucun intérêt à ce que l’Inde accepte une intervention (étrangère) sur une question tranchée par les Accords de Simla en tant qu’accord bilatéral entre l’Inde et le Pakistan. Le Cachemire est partie intégrante à l’Inde. Revenir sur cette question n’est qu’une perte de temps » répond-t-il.

Julien Lathus

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