Mercredi, le Parlement pakistanais a élu Nawaz Sharif au poste de premier ministre, concluant une transition démocratique historique dans un pays marqué par 3 coups d’état au cours de ces 65 ans d’existence. Pour son troisième passage à la tête du Pakistan, Nawaz Sharif va devoir s’atteler à la tâche monumentale de la direction de ce pays de 180 millions d’habitants aux problèmes complexes et criants. Dans son premier discours, il a évoqué la relance économique dans un pays sclérosé et il a appelé les USA à cesser leurs tirs de drones dans les zones tribales.
Nawaz Sharif a fait de l’économie sa principale priorité en évoquant les coupures de courant, le chômage et la corruption. « Je ferai mon possible pour changer le destin du Pakistan et de son peuple » lance-t-il à la nouvelle assemblée. La crise énergétique que connaît le pays est sans précédant et en ses périodes d’intenses chaleurs, Nawaz Sharif était attendu sur le sujet. Dans ce sens, le Pakistan aurait demandé à la Chine, son alliée historique de lui fournir de la technologie dans un but civil. Cette démarche pourrait permettre au pays de sortir de cette crise qui est à la fois économique, structurelle et sociale. Le pays recherche également à développer des stations hydroélectriques ainsi qu’un réseau transnational de pipelines pour désenclaver le pays du manque énergétique.
Au cours de son discours, il a appelé les Pakistanais de l’étranger à revenir au pays et à y investir dans le but de dynamiser l’économie. Ces dernières années, un grand nombre de Pakistanais bien éduqués avaient quitté le pays en raison du militantisme et des activités terroristes.
Il a également évoqué la corruption, qu’il perçoit comme un handicap majeur au développement progressiste du Pakistan. Sans citer de noms, il a indiqué qu’il souhaiterait « coincer quelques gros poissons », une allusion à peine cachée à certains responsables du Parti du Peuple Pakistanais, qui viennent de céder le pouvoir.
L’extrémisme et le terrorisme ont également retenu l’attention dans ce discours d’intronisation. Ces 2 idéologies sont l’un des plus grands défis auxquels le pays doit faire face. Après avoir cité les affrontements religieux qui opposent les Sunnites aux Chiites à Karachi et à Quetta, les attaques terroristes dans les grandes villes du pays et la menace fondamentaliste intérieure, Nawaz Sharif s’est dit prêt à tenir des discutions avec les Talibans.
Autre point important de son discours : l’appel à la fin des opérations de drones sur le territoire pakistanais qui jouxte la frontière afghane. « Face à la banalisation quotidienne des frappes de drones, ce chapitre doit maintenant se fermer » déclare-t-il sous un tonnerre d’applaudissements de la part des parlementaires. « Nous respectons la souveraineté des autres pays. Ils doivent maintenant respecter la notre » rajoute-t-il.
Néanmoins, il n’a pas donné beaucoup de détails sur la manière dont il allait amener la fin de ses opérations que de nombreux Pakistanais voient comme un affront fait au pays. Les USA considèrent ses attaques comme vitales dans leur stratégie contre les militants d’Al-Qaida et d’autres groupes qui utilisent les régions montagneuses des zones tribales comme un refuge.
On le voit, les chantiers sont nombreux. Si il a surtout été sujet de politique intérieure, peu d’aspects de politique étrangère ont été évoqué dans ce discours, si ce n’est les allusions remarquées sur les drones américains. L’Inde est quand même venue sur le devant de cette intronisation puisque Nawaz Sharif a parlé d’une « attention immédiate donnée au voisinage » en souhaitant « une poursuite progressive de la normalisation des liens entre le Pakistan et l’Inde, tout en cherchant activement des solutions à tous leurs problèmes, y compris le Cachemire ».
Julien Lathus.