Tensions sectaires au Pakistan.

Alors que les attaques contre les Chiites atteignent un degré de violence rare au Baloutchistan, des questions se posent sur la capacité de l’état à protéger les communautés et les minorités religieuses du pays.
Samedi dernier, une attaque à la bombe a coûté la vie à …

Alors que les attaques contre les Chiites atteignent un degré de violence rare au Baloutchistan, des questions se posent sur la capacité de l’état à protéger les communautés et les minorités religieuses du pays.

Le marché fréquenté par de nombreux Chiites a été ravagé par une bombe de plus d'une tonne.

Le marché fréquenté par de nombreux Chiites a été ravagé par une bombe de plus d’une tonne.

Samedi dernier, une attaque à la bombe a coûté la vie à plus de 80 personnes sur un marché bondé dans un quartier chiite de la ville de Quetta, capitale de la province du Baloutchistan. Avec près d’une tonne d’explosif et un bilan humain impressionnant, il s’agit de la seconde attaque la plus importante de ce début d’année envers les Chiites de la région après celle de janvier et ses 92 tués. Aux 80 morts de samedi s’ajoutent plus de 200 blessés.

Les leaders de la communauté déclarent que le gouvernement pakistanais ne fait pas assez pour les protéger et qu’il est incapable d’amener les auteurs de violences devant la justice. Ces 2 attaques sont été revendiquées par Lashkar-e-Jhangvi. Ce groupe sunnite intégriste a été fondé à la fin des années 1990, puis banni du Pakistan en 2001 avant d’être référencé comme groupe terroriste par les USA en 2003. Il entretiendrait des liens avec différents autres réseaux comme ceux des Talibans pakistanais et afghans. Il serait également lié dans une sérié d’attaques majeures dont celle de l’assassinat de Benazir Bhutto en 2007.

Les Chiites représentent 10 à 20 % de la population du Pakistan face à la majorité sunnite. Les 2 communautés musulmanes entretiennent un long rapport conflictuel dont les racines remontent aux premiers temps de l’Islam sur la question de la succession de Mahomet à la tête de la communauté musulmane. Au Baloutchistan, la majorité des Chiites sont issus de l’ethnie Hazara dont les ancêtres ont migré d’Afghanistan vers le Pakistan et l’Iran il y a une centaine d’années. Ils seraient aujourd’hui 650 000 au Pakistan, principalement dans la capitale baloutche de Quetta.

L’Organisation Hazara pour la Paix et l’Équité affirme que plus d’un millier d’Hazaras ont été tués au Pakistan depuis 1999 mais que depuis de nombreuses années, personne n’a été amenée à s’expliquer devant la justice pour de tels faits. Alors que le groupe Lashkar-e-Jhangvi (LeJ) menace la communauté chiite d’autres actions, les responsabilités de l’état sont pointées du doigt. Au milieu, la communauté chiite fait part de son indignation et de son mécontentement dans plusieurs manifestations à travers le pays.

Au lendemain de cette attaque, le gouverneur du Baloutchistan, Nawab Zulfiqar Ali Magsi a critiqué les forces de sécurités pakistanaises en soulignant l’échec de ces services et des renseignements. « Nous avons donné carte blanche aux forces de sécurité pour agir contre les groupes terroristes et extrémistes, mais cela n’a pas empêché l’attentat de Quetta » remarque-t-il.

Ce mercredi, la Cour Suprême pakistanaise a étudié le rapport des Services de Renseignements et des secrétaires à la défense et de l’intérieur sur l’attentat de Quetta. Il met en lumière l’échec total de l’administration à contrôler la situation. L’un des points les plus critiques concerne l’acheminement des explosifs qui auraient été acheté ces derniers temps à Lahore. « Mais comment est-t-il possible que les explosifs aient pu être transporté de Lahore à Quetta ? Que font les services de renseignements ? » s’interroge un juge au cours de l’audition. Visiblement énervé, il a indiqué n’être pas satisfait des réponses données par les autorités sur l’échec des agences de renseignements et qu’il attendait un rapport détaillé sur les compétences de ces services. Le gouvernement a annoncé des opérations des forces paramilitaires contre le LeJ et le remplacement du chef de la police du Baloutchistan pour clamer la situation.

Hier, les Chiites pakistanais se sont livrés à plusieurs protestions dans la majorité des grandes villes du pays. A Quetta, grève générale à l’appel des partis chiites et de plusieurs autres politiques. Sit-in et violences à Karachi où le mouvement paralyse la ville pour le deuxième jour. Enfin, ce mercredi, les victimes de l’attentat commencent à être enterrées après une attente de 3 jours en forme de protestations dans un climat de haute tension

Sources :

Al Jazeera (Qatar) en VO.

The Express Tribune – International Herlad Tribune (Pakistan) en VO.

Julien Lathus

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