Révolution urbaine en Inde, partie 3.

Alors que l’Inde connait un important essor urbain où tous ne trouvent pas foncièrement leur place, cette dynamique peut mettre en péril l’héritage citadin du pays, façonné par des millénaires de culture urbaine. Les méthodes de planification urbaine en Inde, mises en place dans les …

Alors que l’Inde connait un important essor urbain où tous ne trouvent pas foncièrement leur place, cette dynamique peut mettre en péril l’héritage citadin du pays, façonné par des millénaires de culture urbaine. Les méthodes de planification urbaine en Inde, mises en place dans les années 1960 n’ont pas donné de grandes considérations au riche héritage urbain indien. Aujourd’hui, de nombreuses voix demandent l’introduction de la notion de patrimoine historique dans la planification et le développement urbain.

Porte historique de Lucknow par Julien Lathus

La rapidité de l’urbanisation impose donc un défi aux villes historiques qui requièrent un processus de développement urbain plus adapté et plus encadré. Tels sont les mots de la ministre de la culture indienne, Kumari Selja.

« L’urbanisation se déroule à une vitesse sans précédent, nous imposant un défi pour les villes historiques. Ces villes nécessitent un processus de développement spécifique » déclare-t-elle au cours d’un sommet des ministres de la culture du Dialogue Asie-Europe, en réunion en Indonésie à la mi-septembre.

L’organisme indien de Conservation Nationale envisage de renforcer le rôle des artisans qui maitrisent les méthodes de constructions traditionnelles pour permettent de conserver le patrimoine historique urbain du pays.

Elle déclare que le ministre du développement urbain, en partenariat avec l’UNESCO a développé un programme nommé « Développement urbain basé sur l’héritage » dans le but de préserver et de promouvoir l’héritage urbain en Inde, si unique et tant diversifié.

Sanctuaire de Nizamuddin à Delhi par Saad.Akhtar, flickr

La ministre poursuit en énonçant quelques exemples de villes qui connaissent actuellement des opérations de sauvegarde du patrimoine urbain comme dans le quartier de Nizamuddin à New Delhi où le Service Archéologique Indien travaille en lien avec l’Agence pour la Culture de l’Aga Khan. Des initiatives sont également en cours dans les secteurs historiques des villes de Bombay, Delhi, Bénarès, Hyderabad, Mysore ou Jodhpur pour la conservation de leur patrimoine.

La ville bleue de Jodhpur par Julien Lathus

Dans cette démarche, l’Inde bénéficie du soutien de nombreux pays occidentaux qui par leur expertise parviennent à dégager des thématiques de sauvegarde des milieux urbains historiques.

Parmi elles, nous pouvons noter la conférence entre l’ambassade de Suisse en Inde, le Réseau de l’Héritage Urbain Indien (IHCN) et l’UNESCO qui a eu lieu en septembre 2010. Mise en place pour partager le savoir et l’expérience de la planification urbaine ainsi que pour présenter à l’Inde les pratiques de conservation de l’héritage urbain suisse, elle a regroupé de nombreux experts qui ont travaillé sur un modèle applicable à l’Inde du XXIème siècle.

Ils ont souligné le fait que l’héritage urbain pouvait être une source de développement dans le cas de l’intégration de ce facteur à la planification urbaine. L’héritage constitue une ressource économique, sociale et culturelle unique que sa négligence conduit à la fondation d’une enclave marginalisée. La notion « d’héritage vivant » semble donc le modèle à suivre pour profiter au maximum du patrimoine historique.

Les participants de cette conférence ont mentionné l’importance de cartographier et d’évaluer l’héritage dans chaque ville indienne pour une action efficace comme ce fut le cas en Suisse depuis 1973, sous l’impulsion d’une loi inscrite à la constitution fédérale.

Cette dynamique permet de mettre en valeur la diversité de l’habitat urbain dans les villes indiennes qui se caractérise par le climat, les matériaux, les techniques, les fonctions et les aspects culturels. A ces faits typiquement indiens s’ajoutent également les nombreuses influences occidentales qui ont façonnées une architecture hybride unique au monde.

Façade de Bhendi Bazaar à Bombay par raychenon, flickr

Style Agrahara dans le sud de l’Inde par BOMBMAN, flickr

Patio dans le style Nallukettu dans le Kerala par arjunnambiar, flickr

Havelis à Jaisamler au Rajasthan par plusgood, flickr

Intérieur d’un Katras à Delhi par varunshiv, flickr

Maison de style anglo-indien à l’abandon à Calcutta par Julien Lathus

Il y a 8 ans, la Banque Mondiale avait mis en garde la Mission de Rénovation Urbaine Jawaharlal Nehru pour q’elle conserve le cap de sa mission. Il apparait pourtant que 10 % des fonds ont été utilisés pour des projets de rénovation. Le reste a été dépensé dans des routes, des échangeurs et d’autres infrastructures.

Le ministère de l’urbanisation et la Banque Mondiale ont néanmoins lancé un programme pilote de développement urbain basé sur les ressources patrimoniales. La première phase du projet devrait concerner 3 villes : Hyderabad, Bénarès et Ajmer-Pushkar. Une conférence sur le sujet est attendue le 1 octobre à l’Université d’Ahmedabad au Gujarat.

L’objectif de cette réunion sera de discuter des différentes approches en matière d’intégration de l’héritage urbain dans la stratégie globale de développement de la ville. Elle devrait également se focaliser sur la réduction de la pauvreté urbaine.

Bombay de nuit alliant patrimoine et modernité par Premshree Pillai, flickr

La dialectique héritage-urbanisation montre donc un certain intérêt dans une Inde en pleine mutation citadine qui apparait parfois comme incontrôlée. L’héritage des villes se doit d’être mis en valeur tant pour sa dimension culturelle qu’économique puisque les villes indiennes sont le principal lieu de polarisation touristique et qu’elles reflètent une culture urbaine millénaire.

Sources :

Rapport de la Conférence de septembre 2010 en VO.

The Times of India (Inde) en VO.

The Times of India (Inde) en VO.

ZeeNews (Inde) en VO.

Julien Lathus

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