Le Gange, toujours plus affecté par la pollution

Le fleuve Gange est à article de la mort. C’est ce que révèle un rapport parlementaire indien très critique face à l’action gouvernementale et pourtant publié sous la présidence d’un membre de la majorité BJP. Chaque jour, la rivière la plus sacrée du pays accueillerait …

Le fleuve Gange est à article de la mort. C’est ce que révèle un rapport parlementaire indien très critique face à l’action gouvernementale et pourtant publié sous la présidence d’un membre de la majorité BJP. Chaque jour, la rivière la plus sacrée du pays accueillerait dans ses eaux plus de 1,3 milliards de litres d’eaux usées, 260 millions de litres de rejets industriels, plus de 9000 tonnes de pesticides agricoles et ce, sans compter les innombrables déchets solides. En dépit de sa situation environnementale désastreuse, le Gange pourvoie en eau potable plus de 400 millions de personnes qui habitent dans sa vallée longue de 2500 km.

Le rapport explique qu’en raison de cette pollution massive, « les eaux du Gange ne peuvent plus être considérées comme fertiles et saintes ». Il s’agit d’un cinglant échec pour le premier ministre Narendra Modi qui avait lancé sa campagne électorale en 2014 à Varanasi, au bord du fleuve sacré en répondant « aux appels de Mère Gange », jurant de prendre soin de ses eaux.

Entre avril 2015 et mars 2017, le gouvernement de Narendra Modi a utilisé 260 millions de $ sur les 1,05 milliards alloués à la Mission Nationale de Nettoyage du Gange. L’audit lancé face à l’utilisation de ces fonds conclut à la lenteur du processus en soulignent des carences de financement et de mauvaise planification des projets. En 2015, le premier ministre indien avait promis d’investir 3 milliards de $ pour un projet de 5 ans visant à nettoyer l’ensemble du fleuve.

Le 11 octobre dernier dans un hôpital de Rishikesh, au bord du Gange sorti des montagnes, G.D Agarwal succombait au terme d’une grève de la faim de 111 jours. Âgé de 87 ans, cet ancien professeur en ingénierie environnementale jeûnait de la sorte depuis le 22 juin dernier pour protester face à l’inaction gouvernementale à nettoyer le Gange.

Le premier ministre indien, Narendra Modi avait fait de la question de la préservation du Gange un thème prioritaire de la campagne électorale de 2014 qui l’a porté au pouvoir. A ce sujet, G.D. Agarwal avait publiquement interpellé le premier ministre Modi dans une lettre ouverte dans laquelle il appelait à faire cesser les différents projets de barrages hydroélectriques et de carrières de sable le long du fleuve. « Jusqu’à présent vous n’avez fait que prendre à Gangaji (terme respectueux pour le fleuve Gange). Vous ne lui avez pas apportez grand chose » écrivait-il.

Habité d’un savoir universitaire réputé et d’un militantisme actif, il avait au cours d’une précédente grève de la faim de 38 jours a réussi à empêcher la construction d’un barrage sur la rivière Bhagirathi, un affluent majeur du Gange. Mercredi, la veille de sa mort, le ministre d’état pour les eaux et la régénération du Gange, Mr Nitin Gadkari lui avait demandé de mettre fin à son action, lui promettant des actions face à ses demandes. Des actions qui ont paru trop légères pour G.D. Agrawal qui en fut irrité selon un de ses proches.

La lutte pour la préservation du Gange n’est pourtant pas terminée. A Haridwar, à quelques kilomètres de l’hopital où s’est éteint G.D. Agrawal, Matri Sadan (la Demeure de la Mère) est un lieu historique du militantisme visant à nettoyer le Gange. Il était devenu le lieu d’attache du spécialiste environnemental en 2012 quand il s’est retiré du monde. Ce monastère hindou est peuplé d’hommes saints qui ont fait vœux de sacrifier leur vie pour s’assurer que le fleuve puisse s’écouler librement, sans aucune obstacle crée par l’homme.

Mercredi 24 octobre, deux moines de la Matri Sadan ont entamé une grève de la faim illimitée, demandant au pouvoir de respecter ses engagements pris en 2014 pour la régénération du Gange. « Nombreux ont fait le vœux de mourir pour le Gange » explique un des moines de la congrégation.

Julien Lathus

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